Des nouvelles du Beaujolais
I- Le beaujolais tout le monde connait !
Quand on dit Beaujolais, on pense … au Beaujolais nouveau !!!
A- Un vin, de couleur grenat clair, fruité, gouleyant
, qui se boit tout seul.
Un vin un peu méprisé des amateurs et des professionnels.
Parce qu’il très « formaté » : la même couleur, les mêmes arômes et le même goût, chaque année, à peu de chose près.
Oui, oui, oui, …😊
Des milliers de litres de « Beaujolpif » sont produits et bus chaque année dans le monde.
Et ont fait l’image du Beaujolais : un vin festif et facile à boire.
Et circulez, y a rien d’autre à voir.😑
Eh ben si, justement !😀
B- Le Beaujolais c’est aussi 10 « crus »,
au nord de la région, qui produisent des vins de caractère.
Chacun le sien.
J’aime le Beaujolais.
Et j’assssummme !
Mais je n’avais jamais été sur place.
Pour moi rien ne vaut de voir les paysages, de se promener dans les vignes, de discuter avec les vignerons et de déguster leurs vins pour vraiment se faire une idée du « caractère » d’un vin.
J’ai découvert une région splendide.
Une région vallonnée couverte de vignes en rangs serrés.
Des vignes au pentes parfois vertigineuses.
J’ai envie de partager le plaisir que j’ai eu à parcourir la région.
De montrer les paysages et de parler des vins que j’ai dégustés.
Je sais donc qu’on y produit autre chose que les millions de litres de Beaujolais nouveau, qui inondent la planète chaque 3ème jeudi de novembre.
Ben non, je ne « méprise » pas le Beaujolais nouveau.
Je prends même du plaisir à en boire 1 ou 2 verres. Oui, Oui !
Des vins qui valent la peine d’être découverts.
Certains sont « tendres », à la structure souple et plutôt légère.
D’autres, plus robustes, peuvent être gardés plus de 10 ans.
C’est ce que je vais expliquer dans cet article.
II- Au nord, il y a les 10 crus
Le Beaujolais c’est 15 820 ha de vignes et 2 900 vignerons (chiffres 2016)
Il y a aussi 12 caves coopératives et 169 négociants.
Au nord de la région, juste au sud de Mâcon, il y a les 10 « crus ».
On passe sans le savoir du vignoble du Mâconnais à celui du Beaujolais, ils sont contigus.
Qu’est ce qu’un cru ?
le mot « cru » vient du verbe « croître » et on appelait ainsi les terrains où la vigne « croissait » en premier
(ah la la ce verbe croître, un cauchemar à conjuguer …😳 )
C’était donc des terrains où la vigne donnait de meilleurs vins
Des terrains qui sortaient du lot
On n’y produit donc presque uniquement des vins de « crus ».
Au sud de la région des crus, on produit du Beaujolais-Village et du Beaujolais « tout court ».
La majeure partie du Beaujolais (tout court 😉) est vendue en primeur : le Beaujolais Nouveau.
Pour les Beaujolais-Village (partie centrale et nord du vignoble), c’est le contraire ; seule une petite fraction est bue en primeur, l’autre fraction mérite d’être conservée quelques années ( 5 ans en moyenne).
A- Pourquoi cette répartition nord-sud
Tout simplement parce que le sol des 2 régions est différent.
Le Gamay, cépage unique du Beaujolais rouge, donne de bien meilleurs vins sur les sols du nord, que sur ceux du sud.
Pourquoi ?
C’est lié à la façon dont le Gamay pousse sur ces 2 différents terrains.
Prêt pour une petite explication ?
Go !
B- Le gamay, cépage du Beaujolais rouge
C’est un cépage productif. Il faut donc le planter sur un sol pauvre pour que ses raisins soient plus concentrés. Il donne un vin coloré, fruité (cerise, fraise, framboise), mais peu tannique. Son degré d’acidité dépend du sol.
1- Le gamay du Beaujolais et Beaujolais-Village
Il pousse donc sur de sols calcaires.
Sur ces sols (trop alcalins), les racines du Gamay restent en surface, elles ne cherchent pas s’enfoncer en profondeur pour aller chercher de l’eau pour se nourrir.
Du coup le jus reste acide. Une vinification spéciale (voir plus loin) permet d’en faire un vin frais et gouleyant, facile à boire mais qui vieillit mal ou pas longtemps.
2- Le gamay des 10 crus du nord du Beaujolais
Les sols sont des granites décomposés (un sable rose grossier), des schistes ou des roches volcaniques.
Sur ces terrains acides qu’il aime, les racines du Gamay plongent de bon coeur en profondeur pour aller chercher de l’eau et des minéraux.
Du coup, même si ça parait contradictoire, le vin est moins acide, il a plus de concentration et d’équilibre, plus de caractère.
Chacun « cru » a le sien.
Il y a les tendres, fruités, souples, mais sans manquer de matière : Fleurie, St Amour et Chiroubles.
Et il y a les plus robustes, qui peuvent vieillir 10 ans et plus : Juliénas (on prononce « Juliéna »), Chenas, Moulin à Vent, Morgon, Régnié, Brouilly et Côte de Brouilly.
Alors déjà, il faut les retenir les noms des 10 crus du Beaujolais ! Moi j’en oublie toujours un.
Et en plus il faudrait savoir, lesquels sont « tendres » et lesquels sont « robustes » ?
Gloups 😳 !!!
Vous voulez un truc ? Un petit moyen mnémotechnique des familles ?
C’est parti !
Pour les tendres 💐:
Le tendre Beaujolais offre des fleurs (Fleurie) par amour (St Amour) à une jolie chinoise (Chiroubles)
Pour les robustes 💪
Le tout de mon « cru ».😜🤣
Jules (Juliénas) le robuste régnait (Régnié) avec morgue (Morgon) sur les chênes (Chénas) du moulin (Moulin à Vent) au dessus du brouillard (Brouilly) des coteaux broussailleux.(Côtes de Brouilly) 👍
C- Les ceps sont taillés en gobelet
Une photo valant mieux qu’un long discours, voici comment ça se présente.
On garde 4 à 5 bras au ceps, qui donnent une forme rappelant celle d’un vase ou d’un gobelet. Le Gamay a un « port » dressé : même longs, les rameaux restent dressés vers le ciel. Ça permet de bien exposer les grappes au soleil.
Evidemment c’est une forme qui demande beaucoup de travail au moment de la taille. D’autant plus que la densité de plantation est élevée : 10 000 pieds/ha.
Maintenant , quand ils replantent, beaucoup de vignerons plantent mois serré, et en ligne, de manière à pouvoir palisser.
D- La vinification à la Beaujolaise
Vinifier, c’est transformer le raisin en vin.
Tout simplement.
Le Beaujolais a une technique bien à lui : la macération semi-carbonique.
Non, non, ce n’est pas un gros mot 😃, je vais vous expliquer ça tout de suite.
On place les grappes de raisin entières dans les cuves.
Sous le poids des grappes du dessus, celles du dessous sont – un peu – écrasées (ce qui fait dire à celles du dessous « eh lâche-moi la grappe !!! »)
Ok c’est nul …🤭
Je reprends.
Sérieusement.
Donc, en bas de la cuve, on a du jus, venant des grappes écrasées par les autres. Ce jus commence à fermenter, se transformant en alcool et gaz carbonique.
Le gaz carbonique remonte vers le haut de la cuvent remplit les espaces laissés libre entre les grappes du dessus: on dit qu’il « sature » la cuve.
La suite est assez technique. Comme je ne veut pas vous perdre, je le réserve pour un article futur « La macération carbonique » (pour ceux qui aiment la technique !).
Grosso modo, cette vinification permet d’obtenir :
- des arômes fleuris (pivoine, iris), caractéristiques du Beaujolais
- des vins moins tanniques, plus souples , plus aromatiques.
On la pratique avec certains cépages, car elle donne un vin bien meilleur qu’une vinification classique de vin rouge.
III- Quoi voir en Beaujolais, dans quel ordre, où déguster
Le Beaujolais, c’est une splendide région vallonnée couverte de vignes en rangs serrés (ça je l’ai déjà dit, je sais)
Des vignes au pentes impressionnantes (oui ça m’a marqué !).
Des sites connus dans le monde entier.
A- On peut d’abord s’y promener,
à pied, à cheval, en voiture pour s’imprégner des paysages
- la couleur des sols
- l’aspect des vignes
- les maisons en pierre,
- …
1- Pour se rendre compte
combien le travail de la vigne peut être difficile dans des pentes de 30 à 40%.
2- Pour y voir travailler les tracteurs « enjambeurs » :
le tracteur à une roue à droite du rang, et l’autre à gauche, bref, il enjambe le rang !
C’est un tracteur conçu pour les vignes aux rangs serrés, une particularité bien française.
3- Pour y voir les sites mondialement connus :
a- Le moulin de Moulin-à-Vent
Il a été construit en 1450 sur un promontoire à 254 m, à mi-coteau. Ses murs en pierre rouge de la région font 1m20 d’épaisseur. Excusez-du peu !
Il fallait 48 m2 de toile pour le faire tourner.
Il a fonctionné – comme moulin à grain – jusqu’en 1819.
C’est maintenant une propriété privée. Mais on accède au site librement. Pour visiter l’intérieur, prendre rendez-vous.
b- La Chapelle de la Madone à Fleurie
Elle a été construite vers 1870.
Dans quel but ?
Il y a 2 hypothèses :
- soit pour prier la Vierge d’épargner les vignes de l’oïdium (un champignon venu des Etats Unis qui attaque les feuilles et les grappes)
- soit pour préserver les villageois de Fleurie de l’invasion des Prussiens.
Elle se dresse au sommet d’une colline, entourée de vignes.
De l’esplanade devant La Chapelle on a une vue imprenable sur les vignes et les villages alentours.
c- Le Mont Brouilly
Il culmine à 484 m.
Lui aussi porte une chapelle construite par les vignerons, à l’époque où l’oïdium a fait son apparition (avant La Chapelle de la Madone).
Les vignes du Côte de Brouilly montent à l’assaut de ses pentes jusqu’au niveau où les bois prennent le relais.
Un parcours pédagogique y a été aménagé. Une terrasse panoramique permet d’admirer la vue sur les vignes.
Entre la route et la terrasse, un échantillon de chacun des roches du sous-sol de la région a été amené. Impressionnant et très instructif !
4- Pour découvrir au sud, le pays des Pierres Dorées
C’est le Beaujolais calcaire, un calcaire blond, qui a été utilisé pour construire maisons, églises et châteaux.
a- Le village d’Oingt
Ancien village vigneron entouré de murs, c’est maintenant un village d’artistes.
Il a été impeccablement restauré. A tel point qu’il a été « Plus beau village de France »
Les voitures y sont interdites
b- Le château de Jarnioux
c- L’Espace Pierres Folles
Pour découvrir
- l’histoire géologique de la région,
- les différentes roches du sous-sol
- les sols viticoles.
Très pédagogique !
B- Ensuite s’initier à l’histoire et à tous les métiers du vin
Au hameau Dubœuf à Romanèche Thorins
Georges Dubœuf est originaire d’une famille de vignerons depuis 4 siècles. Lui est né en 1933.
Son génie a été d’aller proposer ses vins à de grands restaurateurs et de les convaincre de servir ses vins à leurs tables.
Ensuite de créer une activité de négoce : il crée un groupement de producteurs, met leurs vins en bouteilles et les vend.
Officiellement créé en 1964, son négoce est maintenant présent dans de nombreux pays (USA, Australie, Japon, …) et son nom, garantie d’une qualité constante.
Dans le prolongement de son activité de négociant-vigneron, il a donc créé le hameau Dubœuf : c’est un espace de 30 000 m2 dédié à la vigne et au vin.
Autant dire qu’il faut prévoir la journée pour profiter de toutes les activités proposées. L’entrée coûte 20€, mais on en a pour son argent !😀
- 15 salles d’exposition avec
- des maquettes,
- du matériel de travail de la vigne et du vin,
- des échantillons de sol des différents secteurs du Beaujolais
- de panneaux explicatifs
- des video sur la vinification, la fabrication des barriques, …
- des spectacles audio-visuels, dont un film 3D qui date un peu, mais bon …
- un musée du chemin de fer ; eh oui, c’est le train qui a permet de transporter le vin plus loin et plus vite, en particulier jusqu’à Paris
- un jardin des senteurs, où sont plantés des fleurs, des herbes aromatiques, des épices ; tous arômes que l’on peut retrouver dans le vin
- … et une dégustation d’un Beaujolais de la maison Dubœuf !
C- Puis déguster au domaine
Mon article étant déjà assez long, je vous propose de nous retrouver dans mon prochain article pour les dégustations au domaine.
J’espère que mon article vous aura donné un autre point de vue sur le vin du Beaujolais.
Et qu’il vous aura donné envie de découvrir la région, ses vignerons et ses vins.
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A très vite pour mon prochain article.
Sources
- Guide des cépages et terroirs – Charles Frankel
- https://www.hameauduvin.com/
- http://www.duboeuf.com/
- Le Beaujolais en quelques jours – Collection Lonely Planet